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« Nous avons connu un millésime exceptionnel », interview d’Olivier Farouz pour l’Agefi Actifs magazine.

Le président de Groupe Premium dresse le bilan de l’année 2024 notamment dans la gestion de patrimoine. Il évoque également la dernière opération avec Blackstone, ainsi que la relation avec les différents fonds au capital.


Paris, le 20 janvier 2025

Le président de Groupe Premium dresse le bilan de l’année 2024 notamment dans la gestion de patrimoine. Il évoque également la dernière opération avec Blackstone, ainsi que la relation avec les différents fonds au capital.

Pouvez-vous nous raconter l’histoire du Groupe Premium ?

Ma carrière a débuté dans les années 90, au sein d’une filiale du Crédit Mutuel, avec la volonté de démarrer un projet entrepreneurial.

J’ai fondé ma première société en 1997, Predictis, courtier spécialisé en assurance-vie et épargne. En 2000, je choisis de créer Groupe Premium, qui détient 100 % de Predictis et par la suite nous avons été le premier groupe de courtage à détenir sa propre société de gestion, Flornoy Ferri. Aujourd’hui, Groupe Premium regroupe plusieurs entités comme Capfinances, I-Kapital, Neolife et Premium CGP.

L’année 2018 marque un tournant radical pour le Groupe, avec l’arrivée du fonds d’investissement Montefiore Investment sous la houlette d’Eric Bismuth. Le Groupe est transformé en profondeur. Avant leur arrivée, une différence générationnelle existait entre mon ancien associé et moi-même, ne me permettant pas de mener tous les projets auxquels je pensais. Avec Montefiore au capital, nous avons connu une libération des énergies très forte.

Je fais partie des chefs d’entreprise qui ont l’honnêteté de dire que sans les fonds d’investissement, Groupe Premium n’aurait jamais atteint la trajectoire de croissance connue ces six dernières années. Les investisseurs ont apporté leur image, leur force de travail, et de la structuration dans les opérations. Montefiore est rentré sur la base d’une valorisation de 25 millions d’euros. Trois ans après, Eurazeo est devenu majoritaire lors d’une opération valorisant Groupe Premium à 290 millions d’euros. Et deux ans plus tard,  Blackstone a apporté son financement sur la base d’une valorisation à 1 milliard d’euros 150 millions d’euros.

Comment s’est passée la dernière opération avec Blackstone ?

Sur le plan personnel, j’ai vécu une année 2024 compliquée car je sortais d’un process très difficile qui avait mal démarré. Le début des discussions tombait au moment des débats sur la directive européenne « Retail Investment Strategy » relative à l’interdiction des rétrocessions d’honoraires. À ce niveau de valeur, les fonds d’investissement souhaitent légitimement minimiser les risques.

Cependant, le montage qui a été fait avec le financement de 400 millions d’euros par le fonds Tactical Opportunities de Blackstone, était celui pensé initialement avant le lancement du processus d’offres.

En avril 2023, le process n’a donc pas abouti, lié notamment aux incertitudes de la directive européenne. L’opération avec Blackstone a pu être définitivement ficelée à l’été 2023. Le deal s’est fait sur l’humain. La rencontre avec Lionel Assant, le co-responsable mondial des investissements chez Blackstone, a été déterminante.

Quel bilan faites-vous de l’année 2024 ?

Une année exceptionnelle. Tout le monde pensait qu’après l’épisode tumultueux du process, une période de flottement démarrerait. Ça n’a pas été le cas, bien au contraire. La collecte nette a atteint 3,8 milliards d’euros en 2024 contre 2,6 milliards en 2023. Entre 2023 et 2024, le chiffre d’affaires est passé de 255 millions d’euros à plus de 333 millions d’euros. De plus, 91 % de notre croissance provient de la croissance organique. Cela nous permet d’être très sélectifs sur nos acquisitions, et d’avoir une certaine liberté. Ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Aussi, nous sommes très précautionneux à garder nos talents dans la durée, notamment via le partage de la valeur. À chaque opération, le cercle des salariés actionnaires et partenaires s’est élargi. Aujourd’hui, plus de 700 personnes sont présentes au capital sur un total de 450 salariés et plus de 1300 partenaires.

En cinq ans, la physionomie du groupe a totalement changé. Notre première structure en termes de chiffre d’affaires est Capfinances, spécialisée dans la distribution de contrats d’assurance vie et de solutions retraite auprès de particuliers et de professionnels. En deuxième position nous avons Predictis. Ensuite, il y a les produits structurés avec I-Kapital, et la gestion d’actifs avec Flornoy Ferri, qui ont réalisé une superbe année. Et nous avons l’activité regroupant les conseillers en gestion de patrimoine (CGP). L’ensemble du périmètre représente plus de 15 milliards d’euros sous gestion.

Quelle est la feuille de route avec Blackstone ?

Premièrement, nous avons un boulevard sur l’activité liée au courtage marquée par des gains quotidiens de parts de marché. La stratégie de croissance passe par l’ouverture des centres d’affaires et le développement du réseau des partenaires. Deuxièmement, nous introduisons de nouveaux produits dans ces réseaux, comme la prévoyance ou l’assurance emprunteur. Par ailleurs, des réflexions sont en cours pour la création de notre société de gestion de portefeuilles dans l’immobilier. Alors que je refusais de le faire depuis cinq ans, j’estime à présent que c’est le bon moment, avec un point bas de marché. Enfin, l’international est le prochain sujet. Nous menons des discussions très avancées en Italie. L’Allemagne est également, un des pays que nous étudions.

Quelles relations entretenez-vous avec vos trois actionnaires financiers ?

La relation avec Eurazeo, Blackstone et Montefiore Investment est fluide, capitalistiquement et humainement. Je respecte dans les process de décision ou dans ma communication, les organigrammes et la place de chacun. Aujourd’hui, les équipes d’Eurazeo, actionnaire majoritaire, sont mes interlocuteurs quotidiens. Ça n’empêche pas d’échanger très régulièrement avec Blackstone ou Eric Bismuth sur les affaires en cours et de recueillir leur expertise toujours précieuse. Je suis heureux de voir que les trois fonds s’entendent très bien entre eux. Aujourd’hui, nous sommes vraiment dans une situation que l’on peut qualifier de confortable, idyllique. Nos équipes sont de plus en plus affûtées. Le développement de Groupe Premium ne s’est pas fait sans quelques difficultés. On ne dirige pas une entreprise qui se valorise 25 millions d’euros comme une entreprise qui vaut plus du milliard d’euros. Pour progresser ensemble, nous avons dû faire preuve d’adaptation et développer notre équipe avec des personnalités différentes. Les équipes évoluent, des personnes nous rejoignent, d’autres prennent une autre direction.

Vous avez annoncé un changement de direction générale en novembre. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de ce choix ?

Il fallait trouver une nouvelle organisation pour pouvoir interagir en permanence avec les fondateurs, le management, les équipes opérationnelles et les trois fonds tout en faisant face aux nouveaux enjeux. J’ai présenté cet organigramme : Jean-François Garin et Didier Zerbib comme directeurs généraux délégués et Marie Artaud Dewitte comme directrice générale adjointe.

Je connaissais bien Jean-François. Il a une expérience très solide dans le secteur des assurances. Didier Zerbib, cofondateur de Capfinances, était directeur du courtage depuis 2022. Quant à Marie Arthaud Dewitte, elle a été indispensable à la réussite de notre dernier process, en tant que Directrice Juridique.

Aujourd’hui, je suis extrêmement satisfait de cette réorganisation, car nous sommes tous très différents, mais nous apportons chacun nos spécificités, une complémentarité très efficace pour le groupe.

Quelles sont vos ambitions dans la gestion de patrimoine ?

Nos ambitions sont très fortes. Depuis la création du pôle Premium CGP en 2022, environ une vingtaine d’acquisitions ont été réalisées. L’idée de départ était de s’implanter dans des régions via des structures importantes. Ensuite, d’aider ces structures à se développer dans leur région et on peut dire que ça fonctionne avec un développement permanent. Nos ambitions sur ce pôle vont se poursuivre et se traduire par des opérations de croissance externe notamment en Bretagne et en Auvergne Rhône Alpes.

Sous la direction de Peggy Vendel, nous disposons d’une équipe interne M&A talentueuse pour saisir les bonnes opportunités. Le pôle CGP s’est aussi bien développé sur le segment des family offices avec la récente acquisition d’Agami. Au départ, le marché nous percevait comme un vendeur mass affluent. Aujourd’hui, leur vision évolue, puisque nous sommes performants et crédibles sur l’ensemble des segments de clientèle.

Quels sont les objectifs sur 2025 ?

Des objectifs et des stratégies ont été fixées, et nous allons tenter de poursuivre sur la lancée de 2024. Le contexte politique risque d’impacter la gestion de fortune. Actuellement, c’est très compliqué de garder des grandes fortunes en France. Sur le segment mass affluent, le contexte joue moins car les parts de marché à acquérir sont encore nombreuses. Sur notre pôle Premium CGP, des acquisitions pourront avoir lieu cette année. Mais dans chaque acquisition, l’aspect humain est primordial. Pour faire un deal, nous devons partager le même état d’esprit que les dirigeants avec qui nous traitons. La différence m’importe peu tant que nous partageons des valeurs communes (partage, sens, management).

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